LE MYTHE DE LA VIE D'ARTISTE
par Maria Claudia Galera et Henri-Pierre Jeudy, d’après leur enquête de terrain à Belleville-Ménilmontant, réalisée pour le Ministère de la Culture.
Editions Circé, 2011, 160 pages, 16,50 euros.




"Le mythe de la vie d’artiste a-t-il encore un sens aujourd’hui ? Dans une société qui multiplie toutes ses capacités de gestion, y compris celles qui concernent la culture, le désir de création s’accompagne toujours d’une intention de changement de vie, de l’imaginaire d’un ailleurs, de cette autre organisation du temps qui serait le fruit de notre volonté. Ainsi de nombreux artistes vivent dans leurs ateliers, entourés de leurs œuvres, dans les quartiers des grandes villes, comme à Belleville, en pensant former des communautés dissidentes. Tout ce qui caractérise « la vie d’artiste » se réfère pourtant à des stéréotypes sociaux de comportement dont l’originalité apparente demeure conventionnelle. La croyance en l’art n’est-elle que le réceptacle de nos désirs de liberté de création ? Cette idéalisation de l’art que consacre la multitude de pratiques artistiques, nous fait penser que, de la banalité apparente naîtra la singularité des objets, des modes de perception, et par conséquent de la vie elle-même. C’est l’art lui-même qui nous laissera toujours espérer que la vie puisse être différente... "

EXTRAIT SUR LE GOURBI DE LA MARE
"Une vitrine donne à voir l’état d’esprit du «Gourbi de la Mare». On aperçoit une composition d’objets encadrés par deux torses féminins, des parties de mannequin sur lesquelles on peut lire des fragments poétiques.Au centre de la vitrine, des sculptures partagent la place avec des objets disposés en cascade, des bouts de tissus, des soutiens gorges, des toiles, des poèmes, des photos, des affiches. L’assemblage, comme le définit l’artiste lui-même, est la marque de la mouvance, figuration d’un «cabinet de curiosités» qui évolue tout le temps. La propension à l’excès que l’on peut ressentir dans ce lieu révèle l’accumulation ou plutôt la condensation de plusieurs temporalités, les nouveaux objets s’ajoutent aux anciens, l’œuvre se fait au fur et à mesure et plus que le sens isolé de chaque objet, ce qui est recherché, c’est l’ambiance produite par l’ensemble en évolution constante..." extrait du chapitre ("Les artistes de Belleville").